Brusquement, une large viscosité ronde et plate sortit de dedans la crevasse, c'était le centre, les cinq lanières s'y rattachant comme des rayons à un moyeu ; on distinguait au côté opposé de ce disque immonde le commencement de trois autres tentacules. Au milieu de cette viscosité, il y avait deux yeux qui regardaient…. C'est Victor Hugo qui a écrit et c'est, lui aussi, qui lance le mot pieuvre, il en a fait un monstre, et ce monstre à cette époque d'autres l'appellent poulpe - pieuvre - les scientifiques : céphalopodes… octopus.. Nous, nous en tiendrons à cette dénomination de poulpe.

A l’île Maurice, dans l’océan Indien, pour avoir assisté à la capture de ce poulpe de plus de deux mètres d’envergure, je peux affirmer qu’il faut être très fort, que c’est une rude bagarre et en apnée, même si cela se passe assez près de la surface, ce n’est pas du tout évident !

La technique : l’animal est dans son trou, ce pêcheur enfile son bras à l’intérieur, le poulpe entoure son bras d’un tentacule, progressivement il le retire du trou, jusqu’à l’extérieur et c’est alors que commence la bagarre pour l’anéantir et le ramener à la surface. Le pêcheur est heureux car il y a là de quoi manger pour toute la famille durant plusieurs jours.

J’ai aussi tenté l’expérience, alors je peux confirmer que ce n’est pas facile.

(toutes les photos suivantes ont été prises dans l’archipel de Riou, situé au sud de Marseille, au large du massif des Calanques de Marseille)

Nikonos !!! - objectifs 35 - 28 - 80 -15mm - Flash Master Imasub - film Ektachrome 100 ASA.

 Cet animal ne mérite pas qu’on l’affuble de noms qui nous fassent croire que c’est un animal aussi dangereux et monstrueux tel que le décrit Victor Hugo.

 Au contraire, son intelligence et son regard expressif, presque humain, nous inquiète.

Le poulpe peut se mouvoir de deux façons différentes : en pleine eau il utilise un véritable système de propulsion à réaction, il peut ainsi se déplacer lentement ou rapidement en avant comme en arrière ; sur le fond, il peut ramper en lançant ses bras l’un après l’autre vers l’avant.

Au repos il peut prendre toutes formes différentes, et par le phénomène de l’homochromie, ce céphalopode prend instantanément la couleur su fond sur lequel il se trouve.

 Huit tentacules - sous chacun, il y a 50 pustules - ces pustules sont des ventouses - 400 au total.

Tous les plongeurs vous diront que le poulpe de nos côtes de Méditerranée est vraiment inoffensif. Il est même parfois très joueur et attachant, il accepte les bonnes grâces des caresses de l’homme et je vous assure qu’il est plus enclin a danser avec ces curieux animaux palmés que sont les plongeurs, plutôt qu’a en emplir leur garde manger.

 Il trouvera toujours une anfractuosité pour se dissimuler et observer.

Comme ici, à l’intérieur d’un canon de l’époque napoléonienne, au pied des falaises de Morgiou.

L’amour des poulpes : c’est bien l’aspect le plus mystérieux de la vie de ce céphalopode. J’ai réussi cependant à prendre quelques images caractéristiques, où l’on voit mâle et femelle l’un dans l’autre, se caressant et montrant une apparente et paisible satisfaction.

Ma présence, le bruit de mes appareils respiratoires, la lumière de mes deux flashes, rien ne les troublait, ils étaient tout à leurs amours.

 L’accouplement dure environ 1 heure et parfois plusieurs heures.

Il peut aussi avoir lieu à bras tendu et a distance. (Photo rare)

(Ellis 1991, Encarta 1998, Environment Australia 1999, Stewart 1997, Roper et Hochberg 1988, nous dit: “Chez les mâles, le troisième bras droit est modifié en hectocotyle pour l'accouplement. … Le mâle insère son bras sous le manteau de la femelle, et les spermatophores parcourent ensuite la rainure de l'hectocotyle jusqu'à l'oviducte de la femelle.”

Une fois que l’accouplement est terminé, la femelle repousse le mâle, comme si elle ne songeait plus qu’a assurer le sort de sa progéniture, elle regagne la grotte qu’elle avait choisie, elle ne sera fécondée qu’une seule fois dans sa vie.

Le mâle s’en va d’un autre coté, pour d’autres conquêtes, car il peut s’accoupler avec d’autres femelles, s’il en a le temps pendant cette saison des amours.

La ponte des œufs survient après un délai qui vari beaucoup selon la température de l’eau et la saison. Elle peut intervenir trois semaines ou 2 mois après la fécondation.

La femelle a accroché au plafond de sa grotte ces cylindres blanchâtres d’environ 25 cm de long.

Il y a pour une seule ponte, environ 50 grappes d’œufs et chaque grappe contient jusqu'à 4000 embryons de poulpes.

Durant toute l’incubation, qui dure environ 1 mois, la femelle protège sa ponte contre les prédateurs --- oxygène et ventile les œufs, elle ne quitte plus la grotte --- refuse même de s’alimenter, et elle mourra d’épuisement, peu après l’éclosion.

D’une ponte comme celle-ci, naîtra environ 200000 petits poulpes, 1 ou 2 seulement deviendront adultes, les autres, assureront un maillon de la chaîne du cycle alimentaire des eaux.

Et puis pour celui qui reste, alors qu’il vieillira, qu’il perdra de son énergie défensive, à son tour, petit a petit, il se fera dévorer.

Il deviendra alors, lui aussi, un maillon de la chaîne.

Texte et photos par Gilbert Fournier

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